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Les "enfants paléo"

Après le régime paléo, qui veut reproduire plus ou moins le mode alimentaire des chasseurs-cueilleurs du paléolithique, voici comment on peut élever ses enfants dans la même idée.


Le guide de l'homme des cavernes pour élever ses enfants
 
Par Regan Penaluna
Traduit par Hélios

Chaque soir au coucher du soleil, Robb Wolf démarre son rituel du soir : pendant que ses deux filles sont en train de jouer, il baisse peu à peu la lumière, de quelques lumens seulement toutes les 20 à 30 minutes, jusqu'à ce que sa maison de Reno dans le Nevada, se retrouve plongée dans l'obscurité. La famille est endormie avant 20 h et s'éveille avant l'aube, car Wolf imagine que c'est ainsi que faisaient nos ancêtres il y a des millénaires avant que la lumière artificielle n'interrompe nos "rythmes circadiens normaux".

Pendant ce temps à Brooklyn, Elyssa Starkman et sa fille de 5 ans parcourent ensemble le menu de la cantine tous les matins. Elles discutent des aliments qui conviennent : d'accord pour les viandes et les légumes, non aux céréales et aux aliments transformés – un régime qui selon Starkman s'aligne davantage sur ce que consommaient nos ancêtres paléolithiques.

Elle et Wolf font partie d'un sous-groupe de mamans et de papas qui pratiquent ce qu'ils appellent "l'éducation paléo des enfants". Tout comme les consommateurs paléo qui supposent une incompatibilité entre la biologie de l'homme et la culture alimentaire dans l'occident postindustriel, les parents paléo pensent que les habitudes éducatives modernes n'encouragent pas un développement sain de l'enfant. Nous pouvons élever des enfants plus sains et plus heureux, argumentent-ils, si nous le pratiquons à la manière des premiers hommes il y a 12.000 ans. Un éventail de plus en plus copieux de livres, blogs et ateliers conseillent aux parents de nourrir leurs enfants avec le régime paléo, de régler leur sommeil sur celui du soleil, de faire têter les bébés à la demande, de dormir à leur côté et de les porter sur eux toute la journée.

Mais les peuples du paléolithique vivaient-ils réellement ainsi ? Et est-ce bénéfique ? "Nous avons de très bonnes études scientifiques qui confirment [certaines] déclarations faites par les gens du mouvement d'éducation paléo", dit Alyssa Crittenden, anthropologue à l'université du Nevada à Las Vegas qui étudie les Hadza, un groupe de chasseurs-cueilleurs contemporain de Tanzanie. Comme les Hadza sont isolés et pratiquement sans aucun contact avec la vie industrielle moderne, ajoute Crittenden, ce sont de bons modèles pour imaginer à quoi ressemblaient les parents du paléolithique.

Par exemple, il est probable que les bébés étaient bien plus portés que ne le font les parents actuels dans le monde développé. Les mères Hadza, observait Crittenden, portent souvent leurs bébés dans des écharpes presque toute la journée, depuis leur naissance jusqu'au sevrage (à 2-3 ans habituellement). "Il y a un fort degré de contact physique et une réponse immédiate aux pleurs", ajoute-t-elle, ce qui donne de plus brèves périodes de pleurs comparé aux bébés occidentaux.

Et les mères du paléolithique partageaient probablement la charge d'éducation. Dans un échantillon de 69 enfants Hadza âgés de moins de quatre ans, Crittenden a découvert que seulement trois bébés restaient toute la journée avec leur mère. Les autres étaient passés à un autre parent ou à un voisin. Chaque enfant avait en moyenne deux personnes à s'occuper de lui en dehors de sa mère, libérant la maman pour d'autres choses, comme de s'occuper d'elle ou d'un autre enfant. Ce type de soin coopératif se voit aussi dans la moitié des espèces de primates, explique Sarah Hardy, professeur émérite d'anthropologie à l'université Davis de Californie, suggérant que cette pratique a de profondes racines ancestrales.

Il est également probable que les parents du paléolithique dormaient dans le même lieu que leurs enfants, caractéristique commune aux populations de chasseurs-cueilleurs, ajoute Crittenden. Les familles occidentales évitent traditionnellement cette pratique, connue comme le "co-sleeping" [ou "cododo"], mais il existe des preuves qu'elle peut aboutir à des enfants équilibrés, dit James McKenna, anthropologue à l'université Notre-Dame, qui a observé les bénéfices de ces "schémas ancestraux" dans sa clinique du sommeil. "Les enfants dormant avec leurs parents étaient plus calmes, plus fréquemment capables de résoudre les problèmes par eux-mêmes et plus demandeurs de rencontrer de nouveaux enfants", conclut-il.

Alors la société serait-elle meilleure si davantage de parents appliquaient l'approche paléo ? Probablement pas, dit Marlene Zuk, biologiste à l'université du Minnesota et auteur du livre Paléofantasme. Elle doute que mener un style de vie paléo soit un modèle idéal. Les parents ne devraient pas penser, "Oh non ! Si je dévie de l'idéal, alors mon gosse deviendra psychopathe", ajoute-t-elle. De telles suppositions ignorent en réalité que le cerveau et le corps humains sont incroyablement adaptables. "Ils possèdent une très grande flexibilité".

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